Cimetière moderniste

L’héritage des Indianos à travers l’art funéraire

Le saviez-vous ?

Saviez-vous qu’il existe une Route européenne des cimetières ? Celle-ci comprend les cimetières originaux d’Europe qui vous permettront de découvrir un patrimoine artistique et historique différent.
De toute l’Espagne, la Catalogne est la région qui héberge le plus de cimetières singuliers : un total de neuf, dont huit se trouvent dans la province de Barcelone et un à Gérone, à Lloret de Mar, qui fait partie de la Route européenne des cimetières et de l’Association of Significant Cemeteries in Europe (ASCE)

Le cimetière moderniste de Lloret de Mar conserve la trace de l’héritage indiano. La réforme qui conduisit à la réalisation du nouveau cimetière fut forcée à la fin du XIXe siècle par une partie de la population enrichie dont les familles avaient souvent un lien avec les Amériques, le commerce outre-mer et la richesse que cela générait.

Dès la construction de la paroisse de Sant Romà au XVIe siècle, ses alentours furent utilisés comme lieu de sépulture. Plusieurs propositions d’emplacement pour le nouveau cimetière furent avancées, toutes éloignées du centre névralgique de la vie urbaine. Cette tendance se répandit progressivement partout en Catalogne –essentiellement pour des motifs d’hygiène publique– et ne fut guère bien perçue par le pouvoir ecclésiastique, fondamentalement parce que l’église considérait cette mesure comme une volonté de sécularisation de la société et une tentative d’abandon du culte. En 1891, le nouvel emplacement du cimetière fut décidé et l’année suivante, le projet fut confié à l’architecte Joaquim Artau i Fàbregas. La construction du nouveau cimetière fut possible grâce à l’initiative privée, à quelques familles qui, ayant des liens étroits avec le commerce outre-mer et directement liées à la bourgeoisie barcelonaise, contribuèrent à ce que des architectes de grande renommée comme Puig i Cadafalch participent au projet. L’organisation et la distribution de l’espace du cimetière étaient très bien pensées. Il semble que l’architecte ait transporté les tendances urbanistiques propres aux grandes villes de l’époque à l’intérieur de la « ville des morts » : avenues, promenades, petites places, îlots… Tout l’espace du cimetière est organisé selon des modèles de hiérarchie sociale. L’avenue principale héberge les tombeaux des clients privés, les Indianos. Elle est flanquée des caveaux de deuxième et troisième catégorie. À l’écart de cette zone se trouve un espace destiné aux inhumations civiles et un espace consacré aux non-baptisés. Les monuments historiques du cimetière ont été récemment équipés de panneaux explicatifs en plusieurs langues.

Une promenade dans la ville des morts

Panthéon Costa i Macià
(Puig i Cadafalch − 1902)

Ce panthéon a une structure de chapelle à nef unique. Vous remarquerez la présence de gargouilles et, sur le fronton, d’anges tenant des guirlandes de fleurs, symbole de l’élévation de l’âme dans la tradition classique. L’intérieur contient des éléments médiévalisants, comme la clé de voûte à têtes de mort (les quatre figures des danses macabres de la mort : la dame, le roi, le pape et le chevalier). La grille est inspirée des anciennes grilles romanes.

Bonaventura Conill i Montobbio:

Introducteur du modernisme à Lloret

On pourrait le considérer comme l’architecte du modernisme de Lloret de Mar par excellence. Il a restauré l’intérieur de l’église de Sant Romà, pour laquelle il a également conçu et construit la chapelle du Sanctissime et la chapelle du baptistère (1916). Dans ses interventions, on remarquera l’utilisation d’éléments architecturaux propres à l’œuvre d’Antoni Gaudí, dont il fut disciple : les carreaux apparents rouges ou le trencadís (mosaïque) qui décorait l’extérieur de Sant Romà.

Caveau Durall i Suris
(Conill i Montobbio − 1903)

Les thèmes centraux du monument sont l’ange et la croix. Les deux éléments sont entremêlés physiquement (par l’arrière) et conceptuellement. La croix est le symbole de la résurrection qui utilise la figure de l’ange comme médiateur.

Caveau Durall i Carreras
(Conill i Montobbio − 1903)

Vous observerez une fois encore le motif iconographique récurrent de Conill i Montobbio : l’ange en prière. Grâce aux formes sinueuses de la base, les ailes de la figure s’intègrent à la couverture du caveau. Les mains et le visage de l’ange en marbre blanc sont remarquables.

Caveau Mataró i Vilallonga
(Conill i Montobbio − 1907)

On peut observer plus clairement l’influence de Gaudí, à travers les formes sinueuses et organiques. Comme références symboliques, on remarquera l’épi et la croix, symboles de vie et de résurrection, respectivement. La figure de l’ange est toujours présente, mais ici, elle est devenue abstraite, sous forme de petites figures ailées.

Le bien l’emporte sur le mal

Panthéon Esqueu i Vilallonga
(Conill i Montobbio − 1909)

Il s’agit de l’un des ouvrages les plus complexes. À noter qu’ici, l’architecte se passe de la structure en chapelle qui caractérise les panthéons. L’élément symbolique le plus marquant, le dragon, tient entre ses griffes un crâne et les tables de la loi brisées sur lesquelles figure « Lex ». Le dragon est un animal appartenant au royaume des ombres, menaçant, la bouche ouverte. On remarque également l’arc parabolique sur lequel se dresse la croix de style organique. Ces arcs réinventés par Gaudí sont très présents dans son œuvre, comme nous pouvons l’observer sur le toit de la Casa Milà ou Pedrera. L’inscription de la croix « Ego sum vita » donne la clé de l’interprétation de l’ensemble. Il s’agit de la dualité entre le bien et le mal. La croix est la promesse de salut et de vie éternelle. À l’opposé se trouve le mal, qui attend la distraction du non-respect de la Loi divine pour condamner l’être.

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